Intrusion (PV)

J’avais envoyé Neliki dans le Ghealdan Est avec quelques pièces pour acheter un nouveau chaudron. Celui que j’ai en ce moment est tout à fait fonctionnel bien sûr…Mais, je ne savais plus comment l’occuper pour ne plus l’avoir dans les pattes et ne plus entendre sa voix agaçante. Djinn ou pas, le marché est loin, il en avait pour quelques heures. Quelques heures de calme et de pur bonheur. Je souris pour moi-même.

J’étais assis sur une pierre plate qui me servait de chaise depuis déjà un an, ignorant l’inconfort et la douleur qui venait à mon dos. La prochaine fois, peut-être demanderai-je à Neliki de m’acheter une chaise. Je fis craqué mon cou d’un sens et dans l’autre…Puis, je regardais la tâche qui m’attendait. La tête baissée sur la seconde pierre plate que j’utilisais cette fois-ci comme table, je m’affairais paisiblement à mes affaires. Hier, j’avais trouvé dans la montagne du calcaire où poussait en quantité exubérante du belladone. J’avais arraché avec nonchalance quelques unes de ces plantes comme s’il ne s’agissait que de vulgaires baies. Mais, c’est plus que ça. Le belladone, aussi appelé Cerise du Diable, est un poison utilisé dans certains rituels magiques. Mais, l’aspect qui m’intéresse le plus est le fait que ce soit d’une toxicité mortelle.

J’étais donc penché sur ma nouvelle acquisition et, avec une lenteur flegmatique qui m’est propre en moment de sérénité, je séparais les feuilles des fruits…

Je me suis arrêté soudainement au bout de quelques minutes. Je sens une certaine nervosité venir à moi. Ma respiration s’accéléra furtivement. Et si…Je regardai la boule de cristal à quelques mètres de moi avec insistance. Bon, juste un petit coup d’œil…Je la pris et la mis sur ma table de fortune, mettant de côté le belladone. J’ai observé un moment l’objet en me mordillant la lèvre inférieur avant de me faire craquer une seconde fois le cou et de poser mes mains sur la sphère. Il ne me fut que quelques secondes pour avoir une image de Neleki. Il se trouvait déjà au marché et ne semblait pas s’attirer d’ennui. Bien. Parfait. Mes mains quittèrent la boule de cristal. Je soupire de soulagement. À lui seul, il pourrait détruire un village en entier…

J’envisage un moment à retourner à ma première activité mais un second regard porté sur l’objet magique me fit changer d’avis. Lentement, mes mains revinrent sur la sphère de cristal. J’ai fermé les yeux pour pouvoir me concentrer sur les montagnes. J’ouvris un œil et il se fixa sur un point particulier de l’image qui m’était projeté. Un silhouette. Mes sourcils se froncèrent. Mes yeux se fermèrent à nouveau et je mis toute ma concentration dans cette silhouette pour la voir de plus près. Je regarde. C’était un homme. Un vieillard. Et il était tellement proche… Je me remis sur pied en un seul bon, significatif de mon calme disparu et incontrôlé. Ma respiration devint un tantinet plus forte. D’une main, je grattais le bras jusqu’à m’arracher des lambeaux de chair, de l’autre je pris le premier poignard trouvé. J’avais la ferme intention de tuer le vieil homme sans le questionner et peut-être tainerais-je sa carcasse jusque dans la grotte et commencerais à préparer le repas de ce soir…

…À peine sorti de la grotte, le vieillard se tenait devant moi.

Une aura malveillante dominait les montagnes poudrées de neige et couronnées de blanc. Tout autour de lui, les arbres, sombres pins aux allures menaçantes, semblaient épier le moindre des faits et gestes de l’intrus. Ce vieil homme recouvert d’une longue cape usée par les années et les nombreux voyages. Alors, il se mit à songer qu’avec les quelques pièces d’argent qu’il détenait, Thom pourrait se procurer une toute nouvelle cape, mais l’idée même s’évapora instantanément. Les pensées de Thom divergèrent vers d’autres horizons. Des horizons lointains qu’il était le seul à atteindre.

Il inclina la tête. Ses grands yeux bleus pétillants détaillèrent des buissons épineux agités par l’apparition d’un petit rongeur. Soudain, il huma l’air comme s’il percevrait la source de cette essence familière et sombre. D’abord, il se dit qu’il y avait une manifestation démoniaque dans les parages, raison pour laquelle ses entrailles se tordaient dans tous les sens. Puis, la ressemblance entre son aura et celui d’un autre magicien titilla sa curiosité. Quelque chose ou quelqu’un de sinistre et macabre régnait en maître dans les alentours. La forêt était empreinte de ténèbres.

Et Thom Merrilin, dans sa folie peut-être, souhaitait découvrir l’identité de ce roi des montagnes.

Il poursuivit sa route tout en s’orientant sur un chemin cahoteux. Par moments, des oiseaux perçaient le silence des montagnes de par leurs croassements aigus et effrayants, ces plaintes firent frissonner Thom. Ce dernier ne le remarqua pas totalement, tant il était plongé dans ses raisonnements.

Il connaissait, il en était sûr, la personne ou le monstre qui se tapissait dans les profondes grottes des montagnes. Il en était sûr.

Tout à coup, il déboucha dans une petite clairière sinistre aux odeurs nauséabondes où s’élevait devant lui un amoncellement de roches qui dissimulaient une grotte appartenant à un curieux personnage. L’individu, d’une pâleur livide, se tenait devant l’ouverture du tunnel, l’air dangereux et cinglé, et tenait dans une main un poignard scintillant et menaçant. Thom croisa deux grands yeux verts qu’il connaissait depuis longtemps, des yeux hypnotisants et qui constituaient peut-être la seule beauté de cet homme tout de noir vêtu. De lui émanait une étrange odeur de putréfaction, odeur singulière d’une personne qui pourrit.

-Ah…, fait alors Thom Merrilin en s’appuyant sur son bâton. Cela fait un bon moment que je ne t’ai pas vu, S’caoghalo de Iviry. Si je me souviens bien…

Thom prit une petite pause pour réfléchir, se souvenir, goûter à la saveur amère de son passé. Il fronça les sourcils, inclina à nouveau la tête et sourit.

-La dernière fois, c’était à l’Île Blanche. Tu ne te souviens peut-être pas de moi.

Et Thom gratifia l’individu d’un sourire éclatant.

(J’trouve que S’caoghalo a aussi des similitudes avec Gollum…Il pourrie et il vit isolé dans une grotte…C’est comme thom qui a été torturé par les méchants jusqu’à la folie)

Devant moi, un vieillard au dos voûté, habillé d’une cape terne et usée. Dans ses mains, il n’y avait rien d’autre qu’une canne improvisée. Sa barbe était grise, son visage ridé et il me regardait de ses yeux bleus clairs. Aucun vieil homme normal n’aurait pu arriver à cette hauteur de la montagne à la marche et je le savais avec pertinence.

Et son aura me le prouva. Je la sentais. Elle me traversait par tous les pores de la peau. Cette aura…Je la reconnaissais comme l’on pouvait reconnaître une odeur, un paysage, une sensation, un bruit ou un goût familier. Je finis par arrêter de me gratter bien que ma main ne quitta pas mon bras et je tenais plus mollement le poignard. Un de mes yeux le regardait toujours tandis que l’autre pupille commençait à glisser dans un sens. Mais, je fermais les paupières avant que ce spectacle s’éternise et pris une grande respiration, comme celui d’un animal qui sent sa proie. Pourtant, en faisant cela, j’avais baissé ma garde d’une façon peu habituel. Ma concentration était totalement fixé sur son aura. J’ouvris les paupières, mes deux yeux verts l’observant une nouvelle fois. Son physique ne me disait absolument rien. Mais, son aura…Celle-ci me rappelait de manière désagréable l’Île Blanche. Cela me donna un haut-le-cœur et je dues me pencher pour cracher un peu de vomi. Je serrais à nouveau avec force et conviction le couteau dans ma main.

Le vieillard commença à parler. Je fus agiter par un espèce de tic quand l’homme m’appela ‘’de Iviry’’. Ce nom…Ce nom était presque oublié. On ne m’appelait plus par ce nom. On ne m’avait jamais appeler par autre chose que CursesPwan et que très rarement S’caoghalo bien ce prénom n’était pas inconnu de la plus part des gens.

Ces prochains mots confirmèrent mes pensées. Ce vieillard était un mage de l’Île Blanche.

-D-De Iv-ivr-ivir-y? L’on ne m’ap…

Je fis une pause. Ce foutu nom que je maudissais, je n’arrivais même pas à le prononcer. Et chaque mot que je prononce m’est difficile et insuportable. Trop long à dire pour si peu…J’ai connu cet homme il y a longtemps…Mais, j’ignore qui sait. Je ne sens que cet aura qui me rappelle avec cruauté l’Île.

-N-Ne m’ap-pelez pa-pas comme ça.

Je l’observais avec une certaine frustration d’ainsi ignorer son identité.

-Beau-cou-coup d-de p-personne se sou-souvi-enne de mo…De moi. Ce n’est p-pas pou-r aut-t-tant réci-récipr-proque. Qui-qui êt-tes vous?

[J'ai testé un tout nouveaul style]

-Qui suis-je ? Ah mais voilà donc une interrogation censée et cruciale, car conversez avec un inconnu, cela n’est pas du tout agréable. Me trompais-je ? Qui suis-je, en réalité ? Oh mais quelle question ! Quelle question ! Dans les contrées du Nord, mon nom résonne autrement dans les régions du Sud, l’Ouest et l’Est me voient tout aussi différemment. De leur point de vue, je deviens, comment dire, un personnage au caractère multiple qui se dédouble, qui se dédouble ! Ah ah ! Ah ah ! Mais pourquoi me regardez-vous ainsi, mon jeune ami ? Votre regard me fait penser à une bête effrayée, à une proie prise au piège, à une bestiole énervée et agitée de terribles convulsions ! Que frottez-vous avec autant de vigueur ? Auriez-vous des puissantes démangeaisons ? Je vous vois avec ce poignard à la main, oui, oui ! Celui qui étincelle de mille feux, qui reflète les rayons éblouissants du soleil, celui qui dessine votre image dans sa lame ! Celui-là même qui menace à tout moment de perforer ma tendre chair et répandre sur le sol mousseux mon sang vermeil ! Ah ah ! Ah ah ! Mais qui suis-je, horrible inconnu ? Qui suis-je ? Qui est l’homme venant perturber votre repos, troubler votre quiétude, mijoter votre ténébreux passé ! Qui suis-je, vraiment ? Ah mains voilà donc une interrogation censée et cruciale, car conservez avec un inconnu, cela n’est pas du tout agréable. Me trompais-je ? Qui suis-je en réalité ? Voyez-vous ces roches, tout près de votre hostile caverne, que dites-vous de prendre place et de m’écouter ? Qu’en dites-vous ? Rien ? Vous êtes silencieux, incroyable créature ! Faites comme moi, imitez-moi, suivez-moi ! Voilà que je franchis les quelques pas me séparant d’une de ces grosses roches rugueuses sur laquelle je dépose mon vieux postérieur. Vieux postérieur ! Pouffons de rire ? Quoi, vous pincez les lèvres et me toisez encore avec cet air terrifié ? Vous ne trouvez cela point drôle ? Pourtant, mon vieux postérieur, au contraire de vos idées, était autrefois bien réputé et bien prisé chez les femmes. Elles le touchaient et me complimentaient sur sa fermeté et sa beauté. Pour un homme, je détenais une croupe plutôt divine. J’étais le vice de ces dames, le monstre et l’ennemi impie de la tendre vertu. Je créais sur mon passage des légions d’orgies. Hommes et femmes se roulaient de plaisir à mes pieds, trop intimidés par ma magnificence pour me couvrir de leur ardente passion. Mais, ne te méprends pas mon jeune spectateur, seulement les femmes faisaient vibrer mon cœur. Quelle misère est la vieillesse, nous sommes mous ou bien les femmes nous refusent leurs délicieuses faveurs. As-tu déjà rencontré une divine beauté ? Baisé sa main ? Murmuré de suaves paroles au creux de ses paroles ? Inséré en elle l’offrande ultime du sacrifice ? Glissé dans un monde volupté et de concupiscence. Toutefois, après tant de regards sur vous, je considère que vous n’êtes nullement une beauté saisissante. Par contre, vos yeux d’émeraude ravissent les cœurs naïfs. Oh que diable, que de poésie aujourd’hui ! Voyez-vous, vous m’enchantez, vous m’inspirez, vous entreposez les merveilleux mots dans ma bouche. Oh mais me voilà qui vous émoustille sans doute avec mes histoires douteuses à propos de sublimes femmes. Souhaitez-vous que je vous raconter des récits passionnés et obscènes ? J’en ai plus d’un dans mes poches. Allons allons…La glaive flamboyante d’Eudric ? Le bouton de rose ? Le miel d’Élisare ou encore Le somptueux vin après un coup de langue dans le clair de lune? Non ? Rien de tout ça ? Vous avez perdu votre langue aux chats ? Ah ah ! Ah ah ! Quelle est bonne ! N’est-ce pas qu’elle est bonne ! Bon, me voilà qui renifle de mécontentement, vous ne rigolez point ! Vous êtes silencieux ! Peut-être vous gênais-je, moi qui m’élance sur les sentiers de l’amour et du plaisir charnel. Cependant je n’ai point répondu à votre question, mon jeune ami. Je me nomme Thom Merrilin, barde.

(Parfait ton post ^^…bonne chance pour réussir à en faire d’autre comme celui-là, la barre est haute xD)

J’étais bien stupéfait quand la vieille pourriture (quoi que je ne sois, bien entendu, pas très bien placé pour user ce dernier mot) se met à déblatérer un flot de paroles résonnant d’excentricité. Je restais sur mes gardes, l’épiant comme si j’eus été un animal méfiant, pensant que, peut-être, il cherchait à me tromper d’une quelconque façon avec son monologue interminable. Je l’maginais bien profiter d’une inattention pour murmurer une incantation entre deux phrases ou à sortir un couteau de sa cape.

Sa voix m’importunait, mais son rire était pire encore. D’autant plus qu’il me disait horriblement quelque chose. Cela créait une uniformité avec cette aura néfaste qui me faisait penser aux mages et à leur île damné. Mon regard devint dédaigneux alors qu’il riait. Le vieillard passa un commentaire au bras que je grattais. Je cessai sur le moment, ne prenant pas cette remarque comme la bienvenue. Par contre, il pouvait bien commenter au sujet de mon poignard, je ne le lâchais pas pour autant. Mon regard âpre ne quitta pas un instant sa personne chétive et enroulé dans un manteau. Le vieil imbécile ria une seconde fois se qui me fit tressaillir.

Pourquoi ne me donnait-il pas un non? J’avais envie d’en finir avec sa chair de vieil homme et de la faire bouillir. J’avais envie de faire gicler son sang tellement il m’agaçait. Ça y est, je recommençais à gratter mon bras. Mais, s’il y a quelque chose plus fort que mon énervement, ma frustration et la douleur que me provoquait pratiquement son aura, c’était ma curiosité avide.

Il s’assit sur un rocher, bien trop près de ma grotte à mon goût et de moi-même. Sans arrêter de raconter ses histoires, il commentait ses actions et les miennes. Le vieux sénile cherchait une étincelle en moi, un rire, un sourire…Mais, je ne lui donnais pas ce plaisir et continuait à le regarder comme une créature blessée. Je ne prêtais pas d’importance à ses paroles. Ce que je voulais savoir, c’était son nom. Il me parlait de récits. Je grognais intérieurement. Je me fichais de toutes les histoires qu’il avait à raconter.

Son nom venait enfin à mes oreilles. Mais, ce n’était pas nécessairement le nom que je voulais entendre. Je le dévisageais comme s’il eut été un monstre. Bien qu’il prenait déjà un peu d’âge à l’époque de notre rencontre, ses rides n’étaient par contre pas aussi profondes. Ma colère me faisait bouillir, je lui aurais sauté dessus pour l’étriper s’il ne m’aurait pas rester un peu de constance. Je le regardais d’un air noir et méprisant et ma poigne se sera sur mon couteau.

-Ba-ba-barde? Plu-plu-tô-totôt mage, je-je crois. Qui-qui t’envoies? T-tu n’es en rien le-le bie-bien-bien-bien-ve-nu-nu ici.

-Par le barbe d’Asirirm ! Me voilà qui m’exclame comme un bon vieux bougre éberlué devant les saints poils de notre Dieu. Savez-vous, jeune homme – eh bien, vous semblez encore jeune malgré l’état de décrépitude de votre corps -, ainsi donc ignoriez-vous que le visage d’Asirirm était aussi glabre que celui d’un nourrisson. Oh, évidemment, je n’ai pas eu le privilège de côtoyer cet illustre personnage, mais certaines de mes connaissances me concédèrent quelques vérités sur ce mystérieux Dieu au visage rayonnant. De plus, mes premières études convergèrent dans sa direction puis peu à peu dévièrent vers l’histoire sinistre du Ténébreux emprisonné dans la montagne. Ne trouvez-vous pas ce récit captivant ? Assurément, vous devez sans nul doute le connaître, S’caoghalo, puisqu’étant mon élève dans mes années d’enseignement, je dus vous rabattre les oreilles avec mes découvertes historiques. Ah, les belles années ! Ah, que je soupire à ces souvenirs ! Ah, comme la haute tour blanche me manque ! Ah, comme je me sens las d’errer sur les routes. Quand nous sommes jeunes, nous percevons le voyage comme une série rocambolesque d’aventures périlleuses et extravagantes où l’on confronte de monstruosités malodorantes afin de préserver la vertu et la vie d’une jeune femme en détresse à la suite de quoi, une fois saine et sauve, elle nous récompense de notre bravoure et de courage infaillible. Bien que vous êtes laid, vos yeux durent séduire plus d’une femme, d’Iviry. À moins que les jeux de preux chevaliers vous incommodent fortement. Ah, peut-être êtes-vous puceau après tout. Oh, ne me dardez point un regard aussi venimeux et veillez ranger ce poignard incurvé; il me rend nerveux. La vie dans les montagnes vous a-t-elle éloignée de la civilisation et de l’étiquette à un tel point que vous menacer les étrangers qui se pointent près de votre chaumière de roc. Ne vous inquiétez donc pas, je suis aussi inoffensif qu’un jeune dragon inexpérimenté. Par la barbe d’Asirirm ! Me voilà qui jacasse sans vous permettre de placer un mot. Voyez cette roche, prenez place, prenez place Iviry, qu’on discute du bon vieux temps. En vérité, je me sens nostalgique ces derniers-temps, surtout depuis la vision enchanteresse d’une incroyable beauté le mois dernier. Et moi qui me croyais aussi mou et flasque qu’une carotte trop cuite ! Ah ah ! Comme je me trompais, comme j’abusais de mon mensonge. Lorsque mes yeux de vieillard hébété se déposèrent sur cette créature angélique, je crus me soulager dans mes chausses rapiécées. Ah ah ! Il me fallut quelques secondes avant de réaliser que mon membre défiait les cieux, rigide et puissant, aussi palpitant que le cœur sous notre cage thoracique. Lui si tranquille depuis bientôt dix ans. Mais mais, cette femme. Une beauté renversante, que dis-je ! Des détails croustillants, mon ami ? Cessez donc de jouer le prude et insensible individu face aux charmes envoûtants d’une voluptueuse femme, cela ne vous sied pas du tout. Vous préférez demeurer sur le qui-vive, immobile et debout, m’examinant avec mépris et haine ? À votre guise. Quel esprit soupçonneux vous faites, vous étiez différent auparavant, bon…peut-être aussi déséquilibré qu’aujourd’hui, mais vous sembliez beaucoup plus intéressant et bien moins…paranoïaque. Qu’importe, la vie est dure. Les gens développent de graves problèmes psychologiques. Prenez-moi par exemple, à la suite de mon exil, je dus me dissimuler face à mes ennemis, ceux-ci me recherchant pour m’arracher violemment mes secrets ! Ah ah ! Voilà mes cicatrices ! Étudiez ces poignets mutilés, cette peau lacérée sur mes bras, les marques boursoufflées des tisonniers sur ma poitrine et sur la plante de mes pieds. Regardez ! Regardez ! Ah ah ! Quelle est bonne ! Me voilà bien en train de me contorsionner pour vous exposer la vue horrible de mes blessures de guerre. Car, oui, il y a une guerre entre les deux clans ! Où vous situez-vous ? Parmi les scélérats désireux de libérer le Dieu des Ténèbres, chez les Démons faisant l’éloge de leur propre suprématie sur le monde ou bien chez les gentils se redressant pour confronter l’armée ennemie ? Pour ma part, je me situe dans le clan des gentils, mais je n’ai pas un grand rôle à jouer dans cette bataille. Ah ah ! Me voilà qui caquette sans arrêt alors que vous avez si gentiment sollicité mon départ précipité. Mais je vous souris aimablement et je débite un tas de sornettes. Vous êtes sûr qu’une histoire ne vous plairait pas ?

Asirirm, Asirirm…Je lui avais demandé de partir sur le champs et voilà qu’il me parlait de ce dieu qui me laisse totalement indifférent. Je ne me concentrais à peine sur les mots qu’il prononçait. Je ne faisais que reconnaître son aura. Je ne faisais que reconnaître sa voix qui était la même si ce n’est qu’un peu plus rouée par l’âge. Je le fixais avec une répulsion non-cachée dans l’œil alors que, mentalement, je redessinais ses traits et je voyais le même visage qu’il y a tant d’année caché sous le masque d’un vieillard.

J’écoutais un court passage de son délire de vieux cinglé. J’avais attrapé ces mots en plein vol, comme s’il eut été des objets, simplement pour reconnaître la même tirade que j’avais entendu des milliers de fois. Ses histoires sur le ténébreux qui m’avaient probablement captiver dans les premiers temps de mon apprentissage me faisaient grincer des dents aujourd’hui.

Mon regard haineux et mon esprit complice s’amusaient à visualiser mes maigres jambes faire qu’un bond pour sauter sur la vilaine carcasse de mon ancien maître et mes mains, meurtrières, se serrer avec hargne contre son satané cou. L’idée me fait sourire un court instant sans pour autant supprimer mes airs de sauvage. Je ne l’écoute plus du tout, sachant que, peu importe ce qu’il dit, je n’aurais pas le loisir de glisser un mot avant longtemps. Je voulais le tuer, sur le champs, écraser son faible crâne contre un caillou. Je ne voyais pas ce qui m’en empêchait d’ailleurs. Je n’avais pas peur de lui.

Quelques autres mots chanceux, directement adressés à ma personne, arrivaient jusqu’à mes tympans qui vibraient au passage des ondes sonores pour finalement devenir clairs une fois dans ma boîte crânienne. Lâchez mon couteau? Vieux fou. Pourquoi je ferais une telle chose? Je ne pouvais exprimer ses paroles, le vieillard ne s’arrêtait pas. Il me grondait maintenant de mon manque d’étique. Ne comprenait-il pas que j’étais un lich pourri? Je suis un monstre et un monstre a le droit de menacé les intrus sans qu’on lui fasse de reproche. Je me devais de me montrer méfiant alors que le pays entier souhaitait me voir au bout d’une corde. Rien ne me disait que cet homme n’était pas venu pour me tuer, envoyer par d’autres mages, ou bien encore qu’il était là en espion. Cet imbécile ne cessait de m’appeler Iviry à un point tel que l’envie de plaque mes mains contre mes oreilles me démangeaient terriblement. L’envie de lui trancher la langue aussi me tiraillait. Soudainement, je cessais de martyriser mon bras et regardait le sang et la chair sous mes ongles. Les bras le long du corps, je recommençais à l’écouter.

Il m’invitait une seconde fois à m’asseoir mais je n’en faisais toujours rien. Des reproches, c’était encore des reproches. Avant, avant…Je me fichais de la personne que j’étais autrefois. Elle n’existait plus. Elle repose avec les ossements de ma famille ou de quelques mages dans le fond de ma grotte. Morte. Et ce n’est pas quelque tour de nécromancien qui la ramènera. Iviry n’existe plus. Et mon vieux maître se tortillait maintenant dans tous les sens pour me faire voir quelques cicatrices insignifiantes.

Il ne peut s’empêcher de revenir à ses idioties sur la guerre qui ravage le pays. De quel côté je suis? Ne savait-il pas que j’étais CursesPawn? Le meurtrier? Le traître? L’espion? Beaucoup me croit encore au service du Ténébreux…Ce n’est pas le cas. Mais, il restait tout de même idiot de demander pour qui était mes allégeances alors que je suis pourris par le pécher.

Je grognais de mécontentement à sa dernière question. Dans ma rage, je plantais mon poignard dans le sol. Je me redresse et le regarde avec colère.

-T-Tes hist-hist-histoires ne m’int-t-t-teresse plus depui-puis longt-t-temps.

Puis, hurlant presque, le visage rouge d’impatience, je continais.

-Que fais-tu-tu-tu ici!?