Buvez a ma santé (LIBRE)

Cette nuit-la était froide et Lule n'était que peu vêtue. Elle portait une robe de lin d'un noir délavé dont elle avait déchiré le bas pour qu'il lui arrive a la mi-cuisse, permettant a quiconque de voir briller ses deux poignards attachés aux jarretelles sur ses cuisses. Les manches de la robe étaient longues et évasées, ce qui permettait au vent de pénétrer dans sa tunique et de laisser des frissons parcourir sa peau. Ses cheveux s'envolaient a chaque rafale de vent qui passait dans la ville. Ses petites bottes étaient trempées car elle avait du passer dans un marrais avant de finalement apercevoir la lueur des chaumières.

La jeune exclue ne traînait pas dans les lieux les plus fréquentables pour les filles de son âge mais elle avait déjà affronté pire. Les démons et autres créatures la frôlaient dans les rues étroites et la poussaient contre les murs sans même savoir qu'elle était la. Puis, un groupe nombreux de créatures, elle ne savait pas comment nommer ces bêtes, se dépêcha vers l'entrée d'une taverne, entrainant la pauvre Lule dans leur course. Le bruit du vent se mélangeait avec celui des voix bourrues et des rires gras de ceux qui constituaient sa prison humaine. Elle essayait de se faufiler entre les gens mais ils formaient un petit groupe serré et personne n'avait remarqué sa présence.

Elle s'engouffra dans le pub avec toute la mêlée puis lorsque finalement elle put marcher d'elle même, elle trébucha puis s'étendit de tout son long au sol. Quelques clients se retournèrent et la dévisagèrent avant de comment a rire mais la plupart des gens étaient affairés a boire ou a jacasser. Ses ailes étaient encore ouvertes. La preuve? Quelqu'un de visiblement mal élevé avait marché dessus. Il avait arraché une plume en plus! La plume noire collait sous ses bottes. Elle avait bien envie d'aller la récupérer et en coller une belle au malappris mais elle se ravisa, se disant qu'elle ferait mieux de rester tranquille ce soir.

Lule se releva puis fit disparaitre ses ailes noires. Elle avait repéré un foyer au fond de la taverne. Elle allait pouvoir y mettre ses bottes a sécher. Apres avoir placé ses bottes près de la braise, Lule s'assied dans un grand fauteuil et observa les flammes entamer leur ballet ardent. Un serveur s'approcha d'elle et lui dit que si elle ne consommait pas elle devrait partir. La jeune femme leva les yeux au ciel et compta les pièces de sa bourse.

-Ce que vous avez de plus fort s'il vous plait.

Elle trouverait bien un moyen de partir sans payer.

Ah, ces démons ! Quelle arrogance ! Tous autant les uns que les autres, ils sont persuadés qu'ils sont supérieurs aux autres races... Quelle idiotie ! J'ai autant de facilité à les berner que de simples humains... Décidément, tout était trop simple... J'avais bien envie de me poser un petit peu, de faire une courte pose avant de continuer mon travail. C'est ça, le gros avantage d'être une divinité. Tu te repose quand tu veux, t'as personne pour te gueuler dessus comme quoi le boulot avance pas assez vite. La seule personne qui pourrait me faire ça, c'est Asarirm, et lui, avant qu'il descende de son piédestal pour s'intéresser à ce qu'il se passe en bas, faudrait que le Ténébreux soit libéré... Autant dire que c'est pas pour tout de suite. Même si j'y travaille...

Enfin, tout ça pour dire qu'en ce moment, je suis dans l'archipel d'Ygrath. Bon, d'accord, ça veut rien dire venant de moi : avant même d'avoir prononcé un mot de plus, je pourrai tout aussi bien être à l'autre bout du Ghealdan... Mais c'est pas vraiment mon intention, en fait. Même si cette bande de cornus m'horripile un peu. Et pourtant, c'est une des races que je préfère en ce monde. Toujours à rechercher plus de pouvoir. Un de ces quatre, faudra que j'aille faire un tour au palais, histoire de voir comment ça se présente à l'intérieur... Mais pas maintenant. Là, c'est le repos qui m'appelle.

Je suis pas une grande assidue à l'alcool. C'est un truc de feignants, même le dieu de l'ivresse est une feignasse de première. J'suis désolée, mais avouez qu'il y a de quoi vous plomber le moral : ce gars là passe sa vie immortelle dans des tavernes à boire et à ne rien faire, alors que moi, par exemple, je dois me taper les révolutions, coups d'états, complots, et autres meurtres dans le monde entier... Alors comprenez-moi, j'ai pas spécialement d'atomes crochus avec un tel lambin. Même si je reconnais que c'est pas objectif.

Donc malgré mon aversion pour tout ce qui fait trainer en longueur, je m'engouffre dans une taverne. Ouais, d'accord, l'alcool est un truc de flemmards, comme je l'ai dit plus haut, et j'aime pas les flemmards, comme dit plus haut également. Mais je sais aussi reconnaitre quand j'ai besoin de me laisser aller à la flemme, et dans ces cas là, j'avoue que l'alcool qui passe à ma portée n'est jamais autant le bienvenu.

Mais évidemment, comme pas un fait exprès, j'ai choisi la taverne la plus bondée. Faudra que je pense à me réconcilier avec Onsaar, la divinité qui gère la chance... Vous savez ce que c'est, hein ? Un mot plus haut que l'autre, pis soudain on se rappelle que le mec que vous venez de traiter de tous les noms, ben c'est une divinité supérieure... Généralement, à ce moment là, vous vous êtes jamais senti aussi conne de votre vie. Mais bon, en jouant des coudes, j'arrive à dégoter une place dans un fauteuil prêt du feu. Je pose donc mon séant céans, et je respire un grand coup. Avant de m'apercevoir qu'il y a une fille assez zarb à coté. Plus un serveur qui lui demande ce qu'elle veut boire. J'entends la fille lui demander l'alcool le plus fort à disposition. Je tire alors le serveur par la manche, ou plutôt par le coude.

"La même chose pour moi, mon gars ! Et je paie aussi pour la demoiselle !"

Le brouhaha de la taverne commencait à saouler Lulë. On se bousculait, on envoyait son poing à la figure de n'importe qui. C'était un véritable repère de démons ivrognes. Heureusement il y faisait chaud et les fauteuils étaient très confortables. Ses pieds se réchauffaient lentement sur la brique du foyer et sa main fouillait dans sa bourse pour sortir l'argent nécéssaire à sa consommation. Mais ses mouvements furent arrêtés lorsqu'elle entendit une voix féminine à côté d'elle.

Un femme aux allures peu communes mais fort jolie venait de commender la même chose au serveur en précisant qu'elle allait payer pour Lulë aussi. N'importe qui aurait pu penser que c'était un grand geste de délicatesse mais Lulë avait un doute sur la véritable personne qui était assise à ses côtés. Personne de totalement pur pouvait trainer ici. C'était absurde! La jeune femme avait l'air détendue et pas humaine. Pourquoi? Parce qu'aucun humain peut se sentir à l'aise en ces lieux. Les humains sont trops nerveux, ils ont peur de tout le monde.

Lulë pivota sur son fauteuil pour faire face à sa compagne de beuverie. Les jambes posées sur l'accoudoir du fauteuil, elle se mit à caresser son poignard attaché sur sa cuisse droite puis le prit dans ses mains. Elle caressait la lame de celui-ci avec son index tout en regardant, de ses yeux gris, la femme devant elle. Puis, elle se mit à le lancer dans les airs et à lui faire faire des tours toujours en la regardant. Puis, elle planta son poignard sur la petite table qui séparait les deux fauteuils et souria à la jolie créature qui lui faisait face.

-Vous comptez m'empoisonner ce soir ?

Comme elle finissait sa phrase, le serveur arriva avec les boissons. Servies dans de grandes flutes en verre délavé. Lulë prit sa coupe, la leva puis la but d'un trait avant de jeter la flûte dans le feu devant eux. Elle en commenda un autre et le serveur, visiblement abasourdi par la présente situation lui en apporta un autre en vitesse. La nouvelle flûte était cependant plus belle que la précédente. Elle devait sortir tout juste de l'emballage. Lulë releva sa coupe puis attendit que l'autre fasse de même.

-A votre santé.

Je regardais l'inconnue joueravec son poignard. Faisait-elle cela pour m'impressionner ? Mais moi, la Dame des Ombres, j'en ai tout de même vu bien d'autres. Je regardais donc les virevoltes de la dague dans les airs. Jolie maîtrise. Je me demande où elle avait obtenu une telle habilité. C'est en forgeant qu'on devient forgeron, non ? Soit elle s'est entrainée comme une folle, soit elle a l'habitude de tuer. Et un poignard, ce n'est guère fait pour les batailles rangées. Serait-elle une habituée du meurtre discret ? Intéressant, c'est peut être une adepte ! Je quitte les mouvements de la lame pour la regarder droit dans les yeux. Mon regard a un petit air mutin, une touche d'amusement, et une dose de provocation tranquille et calme qui semble déplacé dans cet environnement. Je ne cille même pas lorsqu'elle plante la lame dans la table qui se dresse entre nous.

"Vous comptez m'empoisonner ce soir ?"

Je partis d'un grand éclat de rire. Elle était méfiante à souhait ! Mais pourquoi on en faisait plus, des filles comme ça ? Par tous les titres d'Asarirm ! Si tous mes adorateurs étaient comme cette créature, je ne serait plus autant sollicitée !

"Pas ce soir, ma beauté, je le crains !" Je ris à nouveau. "Non. Ce soir, je suis de repos." lui dis-je avec un sourire radieux.

Le serveur arriva alors avec les boissons. Ce qu'elle fit alors me fit encore une fois exploser de rire. Non, vraiment, elle était trop drôle ! Quand je repris enfin mon sérieux, elle avait été resservie, et elle avait levé sa flute vers moi, en me disant :

"A votre santé."

Je trinquais avec elle, un sourire ingénu aux lèvres et le regard brillant, prononçant un suave "A la votre également.".

Peut-on savoir ce qu'un être aussi délicat que vous le semblez peut-il se retrouver dans un tel... cloaque ?"

Je ne m'étais pas départie de mon sourire charmeur et amusé.

Tiens donc! La belle inconnue était en repos ce soir. Lulë se doutait bien de quoi elle pouvait bien ressembler lorsqu'elle était en action. Un peu comme elle, toute de grâce et de sensualité, tranchant la gorge d'un ennemi, ses long cheveux blonds entourant son visage. Un sourire caressa les lèvres de l'exclue; c'était une image fort belle et attirante. Cela lui donnait presque envie de la voir tuer quelqu'un, juste pour admirer le tableau. Oh..quelles pensées inpures! L'imagination de Lulë était très fertile et si ca se trouvait, la femme qui lui faisait face n'étaient peut-être même pas une meurtrière.

Peu importe.

Elles avaient trinqué et sans détacher son regard du sien, sauf un instant pour se glisser sur ses lèvres qui affichaient un sourire suave, elle avait échappé un petit rire suite à la question qu'elle lui avait posé.

Elle, Lulë Fulh, un être délicat? Aussi délicate qu'une enclume oui. Elle était rude et dure avec elle même et les autres. Certes, elle gardait toujours son charme et sa sensualité même en étranglant quelqu'un mais à l'intérieur, elle avait l'impression d'être fait de magma. Elle était prête à exploser n'importe quand.

-Disons seulement que je ne suis pas la bienvenue partout.

Elle passa une main délicate dans sa longue chevelure noire et lisse puis prit une gorgée de son élixir avant d'adresser un sourire mutin à sa compagne.

-Et vous ? que fait une dame qui, visiblement, ne manque pas de classe ici, à m'offrir de quoi me rendre ivre ?

"Disons seulement que je ne suis pas la bienvenue partout."

Mon sourire s'élargit.

"Il y a, pour chacun, des lieux où il est bienvenu et d'autres où il ne l'est pas. La seule question qu'il y a à se poser, c'est : être le ou la bienvenue m'importe-t-il ? Pour ma part, j'y ai répondu non."

Sa main vint lisser sa belle chevelure noire, tendait que l'autre apportait à ses lèvres la flute grossière à ses lèvres, qui me souriaient désormais. Si elle savais qui j'étais ! Je m'étonnais, et pas pour la première fois, de cette étonnante capacité que j'ai à charmer les gens. Etait-ce mon coté étrange, décalé ? Ou bien était-ce du à mes fonctions, puisque le complot nécessite souvent de charmer la future victime, et de gagner sa confiance ? Je m'étais bien souvent posé ces questions, mais sans jamais réussir à y apporter la moindre réponse. Juste quelques hypothèses. Ça n'allait pas bien loin.

Et vous ? Que fait une dame qui, visiblement, ne manque pas de classe ici, à m'offrir de quoi me rendre ivre ?

Je remarque qu'elle sait bien flatter, et cela me donne un petit rire intérieur. Moi, je ne manque pas de classe ? Je veux bien en avoir un peu, mais là, c'est tout de même un peu trop ! Quand à savoir ce qui m'a amenée ici, question intéressante...

"Ma présence ici s'explique pour le moins facilement. Je suis en repos, comme je vous l'ai déjà signalé. Alors, je me suis engouffrée dans la première taverne venue. Et me voilà. Onsaar a voulu que j'atterrisse dans la plus bondée du monde entier, mais je suis trop... paresseuse, peut-être, pour me raviser et changer d'endroit. Quand à vous payer vos consommations, disons que je n'ai pas vraiment de problème d'argent..."

Je jetai un rapide coup d'œil à sa bourse, qui ne m'avait pas l'air bien rebondie.

"... ce qui apparemment, n'est pas votre cas." ajoutais-je avec un nouveau sourire, que le verre de la flûte, troublé par l'alcool, vint bientôt cacher au regard de ma compagne de beuverie.

Lulë avait-elle affaire à une riche héritière ingrate ou à quelqu'un qui avait bâti sa fortune. Malgré sa clairvoyance, elle n'en savait rien. L'inconnue semblait agir comme une femme dépourvue de toutes responsabilités. Un peu comme ces pauvres connes qui ont eu la chance de naître fille de duc ou de baron. Lulë les voyait sortir tard le soir et glousser comme de pauvres idiotes devant la nouvelle robe à ladernière mode chez le couturier. Elle les enviait un peu, au fond d'elle. Elle aurait aimé elle aussi avoir tout ce qu'elle veut sans se soucier de ses moyens...Mais sa voie était déjà tracée, et elle n'était pas bordée d'or.

Lorsque son interlocutrice glissa les yeux sur sa bourse, Lulë l'attrapa en vitesse et son réflexe fit sortir ses ailes. Ses grandes ailes au plumage noir se déployèrent et se reposèrent sur les accoudoires du fauteuil. Elle l'ouvrit et regarda le mince amont de pièces avant de jeter un regard profond et honnête à sa compagne.

-Le peu d'argent que j'ai, je l'ai bien gagné.

Si on pouvait inclure que de tuer quelqu'un pour lui prendre sa bourse était une bonne facon de gagner de l'argent, Lulë était donc une bonne personne. Malheureusement l'éthique était en désaccord avec cette méthode de s'enrichir.

La jeune ange déchue prit une dernière gorgée dans sa flûte puis la posa sur la table et reprit son poignard qu'elle avait laissé planté dans le bois verni pour s'affairer à le repiquer sur sa jaretelle. Elle leva un peu e bor de sa robe pour dévoiler un haut de cuisse lisse et musclé juste à point. lulë avait toujours été particulièrement fière de ses jambes mais elle n'en parlait jamais. elle se contentait de sourire quand quelqu'un lui faisait un compliment.

Pendant qu'elle s'affairait à remettre l'arme à son emplacement usuel, et leva les yeux vers l'inconnue.

-Peut-être aurais-je pu moi aussi vivre une vie normale et confortable. Mais les dieux en ont fait autrement. Il m'est arrivé de vouloir les contester mais on m'a bien vite découragé.

Ah ! Ainsi c'était une ange déchue. Miam. C'est que c'est diablement intéressant ces petites bêtes là. Je décidai de ne pas relever ce fait pourtant croustillant. A la place, je préférai moi aussi finir ma flûte. Tandis que l'ange qui me faisait face remettait son poignard à la place qu'elle semblait lui réserver, j'avisai un verre d'alcool non surveillé à porté de ma main. Je le subtilisa discrètement, et le vida d'un trait avant de le remettre à sa place. Ni vu ni connu. Enfin, sauf par la belle en face de moi. Ses jambes étaient magnifiques, soit dit en passant. Elle me rappelaient les miennes. Enfin, quand je m'emmerdais à soigner mon apparence. C'est à dire rarement. Moi aussi je peux avoir des cuisses superbes, si je m'en donne la peine ! Bon c'est vrai que je ne me la donne pas, la peine, mais bon. Il n'empêche.

Elle m'arrache à la contemplation de ses membres inférieurs, qu'elle n'a apparemment pas remarquée dans ses efforts, en prononçant ces mots :

"Peut-être aurais-je pu moi aussi vivre une vie normale et confortable. Mais les dieux en ont fait autrement. Il m'est arrivé de vouloir les contester mais on m'a bien vite découragée."

Je ne pus m'empêcher de m'exclamer :

"Une vie normale ? Confortable ? Je ne voudrais de cela pour rien au monde ! Vivre comme une de ces héritières fêlées du bocal, ou comme ces bourgeoises, qui n'ont tellement rien à foutre de leur vie qu'elle la passe à coudre cent fois le même motif ? Non merci ! C'est un genre de vie bien trop ennuyeux. Il est tellement meilleur de n'avoir pas d'attaches, de faire sa vie comme on l'entend. Voyez, tout à l'heure, j'ai choisi de me reposer, de prendre une pose d'une ou deux semaines, et nul ne m'en à empêcher, nul ne m'a rien dit."

Je recommandais aussitôt quatre verres, comme pour appuyer mon propos. Le serveur revint très vite, et je bus à nouveau une flûte cul-sec. Je lui fis signe de se servir tout en reprenant.

"Ça, c'est sûr que nous contrarier, c'est pas une bonne idée. Regardez-moi, je me suis engueulée avec Onsaar, et quand je veux rentrer dans une taverne, voilà où j'atterris. Et puis, excusez-moi, mais "les dieux en ont voulu autrement", c'est bien gentil, mais faudrait voir aussi à pas nous mettre tout sur le dos. On fait pas la pluie et le beau temps. Quoique pour ça, c'est vrai qu'un de nous s'en occupe, mais bon, ça n'empêche que..."

Merde.

Triple merde.

Là, je suis prise d'une IMMENSE envie de me coller une IMMENSE baffe. Putain, si elle a pas compris maintenant, c'est qu'elle est vraiment conne. C'est à dire : pire que moi en ce moment. Et là, dans ma situation, sincèrement, je crois pas que ce soit possible.

Ça m'apprendra à boire autant sans y être habituée, tiens ! Putain, mais merde, quoi, je suis une déesse, je devrais tenir mieux que ça !!! Je vous jure que si je le croise, ce Kadear de mes ******** avec sa divine ivresse, que ce soit dans sa ****** de taverne du farfadet ou ailleurs, je lui met mon poing dans sa face. Non que ça changeras quelque chose à la merde noire où je suis, mais bon, ça défoule.

"Ça, c'est sûr que nous contrarier, c'est pas une bonne idée. Regardez-moi, je me suis engueulée avec Onsaar, et quand je veux rentrer dans une taverne, voilà où j'atterris. Et puis, excusez-moi, mais "les dieux en ont voulu autrement", c'est bien gentil, mais faudrait voir aussi à pas nous mettre tout sur le dos. On fait pas la pluie et le beau temps. Quoique pour ça, c'est vrai qu'un de nous s'en occupe, mais bon, ça n'empêche que..."

Lulë se redressa. La belle inconnue avait pri sa phrase bien au sérieux. Un peu trop même. La femme mystérieuse en face d'elle était donc une déesse. Une divinité mineure sans doute. Lulë savait que les êtres plus suprêmes ne se baladaient que rarement chez les mortels. L'ange déchue se leva puis fit lentement le tour du fauteuil de la déesse pour s'arrêter devant elle.

Elle avait enfin l'occasion de narguer un de ceux qui avait voué sa vie à l'échec et à l'exclusion. Lulë s'était appuyé sur les accoudoirs du fauteuil puis elle contemplait le visage de cette déesse inconnue. Elle passa ses doigts fins dans la chevelure abondante de la créature puis sourit.

-Ce que je vous hais...Vous et vos semblables...

Son sourire suave n'avait toujours pas disparu et ses yeux ne lachaient pas ceux de la divinité assis en face d'elle. Ellese doutait que tôt ou tard cette déesse lui ferait payer ses paroles mais ici, en public, dans cette taverne; sur le territoire de Lulë (la terre bien sur) ses pouvoirs divins ne lui seraient surement d'aucun secours. il n'y avait que les paroles. Et la haine.

Elle était en colère. elle s'était jurée de faire la peau à ne serais-ce la plus petite divinité qui lui ferait face. Mais la jeune ange était presque tombé sous le charme de la déesse; cela devait faire parti de ses pouvoirs. Elle détestait les dieux. Tellement qu'elle les avaient reniés. Lulë ne croyait plus qu'en elle-même. Elle ne mentionnait l'existence des divinités seulement lorsqu'elle parlait de son statut d'ange déchu. Elle ne leur faisait plus confiance pour absolument rien. Elle ne priait plus, et ne donnai plus d'argent pour les temples divins.

-De toute facon, je n'ai plus de dieu.

Je remarquais très vite la haine et le mépris dans les yeux de l'ange déchue... Aïe. Apparemment, elle ne nous aime pas. Elle se lava, et vient caresser mes cheveux, comme aux prises entre colère et fascination, en contemplant mon visage. Pour ma part, mon sourire avait disparu. Comme si l'énorme bourde que je venais de faire m'avait soudainement dégrisée.

"Ce que je vous hais...Vous et vos semblables..."

Je jetais rapidement un œil autour de nous. Bien. Personne ne faisait attention à nous. Il semblait qu'un spectacle d'écartèlement public d'une humaine dans la taverne attirait tous les regards de ce coté, et pas du notre. Tant mieux. Je regardais dans les yeux, avec une intensité soudaine, l'ange qui me faisait face. Avant de disparaitre, purement et simplement. Elle se retourna alors, et elle put me voir assise dans le fauteuil qu'elle venait de quitter. Mon sourire était revenu sur mes lèvres.

"En temps normal, je devrais vous tuer pour ce que vous avez appris. Mais comme je reconnais que c'est un peu de ma faute que vous avez deviné ma véritable nature, je vous laisse la vie sauve. Seulement, oubliez-moi, dès cette soirée finie. Disons que... c'est un échange de bons procédés..."

"De toute façon, je n'ai plus de dieu."

Je laissais échapper un petit rire. Croyait-elle vraiment que ce n'est qu'en priant ou en donnant aux temples que l'on nous honore ? Ceux qui prient, ceux qui donnent, ne nous intéresse que peu. Nous nous sentons bien plus exister lorsque qu'un être accomplit un acte qui dépend de nos fonctions.

"Vous ne souhaitez plus en avoir, nuance. On ne nous échappe pas si facilement. Tenez, par exemple : quiconque manie une arme comme la votre dans l'objectif de tuer quelqu'un me donne son allégeance, bien plus que celui qui me prie sans rien faire. Aimez quelqu'un, vous honorerez Saun d'une bien meilleure façon que la par la prière, par exemple. A voir vos armes, il est même bien possible que vous soyez l'une de mes disciples, même si vous vous en défendez. Vos actes pèsent plus dans notre balance que vos pensées ou que vos paroles."

"Vous ne souhaitez plus en avoir, nuance. On ne nous échappe pas si facilement. Tenez, par exemple : quiconque manie une arme comme la votre dans l'objectif de tuer quelqu'un me donne son allégeance, bien plus que celui qui me prie sans rien faire. Aimez quelqu'un, vous honorerez Saun d'une bien meilleure façon que la par la prière, par exemple. A voir vos armes, il est même bien possible que vous soyez l'une de mes disciples, même si vous vous en défendez. Vos actes pèsent plus dans notre balance que vos pensées ou que vos paroles."

"A voir vos armes, il est même bien possible que vous soyez l'une de mes disciples" Elle faisait face à Daemya, dame des ombres, déesse des complots et de la trahison. Si Lulë n’était pas une enfant de chœur, cette déesse avait dans son bagage des tas de crimes plus cruels les uns que les autres perpétrés en son honneur. Mais pourtant l’ange déchu avait toujours tué et volé pour elle. Pour SA propre survie. Serait-elle une disciple de la dame des ombres sans même le savoir ? Serait-ce possible?

"A voir vos armes, il est même bien possible que vous soyez l'une de mes disciples" Cette phrase résonnait dans la tête de Lulë. Elle avait toujours voulu rester solitaire, sans personne pour la commander. Bien sur elle ne recevait aucun ordre de la part de la déesse mais ses actes la contentait et c’était assez pour faire douter Lulë sur la responsabilité de Daemya sur la tournure de sa vie.
L’ange déchu tourna la tête et vit ses bottes toujours à sécher près du feu. Elle s’assied sur la brique chaude et sentit la chaleur parcourir son dos presque nu. Dû a la forme de la robe, son dos était nu jusqu’aux reins. Très joli mais très peu pratique pour les temps froid comme cette soirée. Lulë baissa la tête puis ouvrit la bouche.

-Est-ce vous qui avez fait de moi ce que je suis aujourd’hui ?

Je vis le doute dans les yeux de mon interlocutrice. Je trouve incroyable notre divine capacité à semer le doute chez les mortels. Je contemplais pendant plusieurs secondes le visage quasi-défait de l'ange déchue. Mes dernières paroles la troublaient, c'est sa vie qu'elle revoyait à l'aune de mes déclarations.

"Est-ce vous qui avez fait de moi ce que je suis aujourd’hui ?"

Je pris la parole avec une expression totalement neutre sur mon visage. Mon ton, lui, exprimait le plus grand sérieux.

"Non. Nul dieu n'est responsable de votre destin. Nous savons ce qui a été, ce qui est, et ce qui doit être. Votre destin est écrit, certes. Mais ce sont vos propres choix, dépendants des circonstances, qui donnent forme à votre destinée. Je ne suis pour rien dans votre déchéance. Mais vous me servez. Tout comme vous servez Cathrer, qui est mon supérieur hiérarchique. Comment pourrais-je influer sur votre destin, alors que je ne vous aie jamais vue auparavant, et que je ne sais même pas qui vous êtes ?"

Je me levai, m'approchais d'elle, qui était assise devant l'âtre. Mes mains se posèrent sur ses épaules, et ma voix vint à ses oreilles, satinée et discrète.

"Je suis celle que vous appelez Daemya, la Dame des Ombres. Avez-vous déjà tué une fois avec préméditation ? C'est un accident. Deux fois ? C'est une coïncidence. Trois ? C'est une habitude. Dès ce moment, vous êtes mienne. Qu'importe si vous ne m'obéissez pas, si vous ne me servez pas directement. Vous laissez un sillon de mort sur votre passage, et chaque cadavre que vous laissez entonne un chant à ma gloire.Qu'il m'est doux de voir d'aussi bon disciples, à défaut d'adorateurs ! Ceci suffira-t-il à vous en remercier ?"

Ma bouche vint déposer un court baiser dans son cou. A peine mes lèvres eurent-elles apposé leur empreinte sur sa nuque que je m'étais déjà téléporter dans mon fauteuil.

Les lèvres douces de la déesse allèrent se poser sur le cou de l'ange déchue qui était plus que confuse de cette étrange situation. La tête de Lulë s'embruma puis elle tomba par en arrière poussant un petit soupir quasi-inaudible. Puis, lorsque la brume disparut, elle revint à la normale, se demandant pourquoi ce baiser l'avait tant affecté. Surement parce qu'elle était véritablement une de ses disciples. Elle ne voulait pas y croire. Même sans le vouloir, elle dépendait de quelque chose quand même.. C'était un coup à son orgueil de jeune femme indépendante.

Lulë leva la tête puis admira pendant quelques secondes le spectacle d'écartèlement de la jeune femme qui poussaient de longues plaintes à travers les applaudissements et les rires. Lulë se leva puis se dirigea vers l'estrade. Elle prit un de ses poignards puis toujours en regardant Daemya, elle trancha la gorge de la prisonnière souffrante et l'on entendit un long souir sortir de ses lèvres. Le'arme du Lulër était sanglante mais elle ne s'en préoccupait pas. Elle le replaca sur sa jaretière, le sang s'égouttant lentement sur sa cuisse.

-Et le meurtre par compassion, c'est dans votre domaine ca aussi ? Ne ferais-je rien qui ne se résumera pas à vous rendre mon salut ?

L'auditioire avait commencé à applaudir Lulë de son acte. Non pas parce qu'elle lui avait épargné d'autres souffrances. Mais parce qu'elle lui avait lacéré la jugulaire d'un geste vif, laissant une grande marre de sang par terre. C'est que ca les amusait, le sang, ces bêtes hideuses! L'ange noire prit un verre sur une table puis le but d'un trait. Ses mains tremblait. elele n'avait pas honte..Elle ne se sentait pas coupable. elle ne ressemtait absolument rien. C'est ca qui la rendait dans un état si catastrophique. elle ne ressentait rien lorsqu'elle enlevait la vie à un autre..Rien du tout.

Décidément, cette jeune ange déchue était délicieuse !

"Le meurtre par compassion ? Je crois que vous chercher à vous mentir à vous-même. Ce n'est pas par compassion que vous avez achevé cette pauvre âme. La compassion exige une capacité d'altruisme. Mais c'est par pur égoïsme que vous lui avez pris son dernier souffle.
Vous avez cherchez à accomplir un acte grâce auquel vous pourriez m'échapper. Je crains que malheureusement, la compassion n'était point votre motivation première. C'est fort dommage, car cet acte, s'il avait été sincère, n'aurez pas été dans "mon domaine". Le meurtre pour un profit personnel, par contre, l'est."

Mais qu'avais-je à la torturer ainsi ? La pauvre. Elle paraissait si ébranlée. En même temps, je la comprenais. On a l'impression de vivre pour soi, de faire telle ou telle chose pour survivre, ou même pour son plaisir et son confort, sans se soucier du reste. Quel terrible doute doit vous envahir, lorsque vous vous rendez compte que chacun de vos actes est reçu comme une offrande par tel ou tel dieu...

Sincèrement, c'est quelque chose que j'aimerais ne jamais ressentir. Alors, pourquoi continuais-je ainsi à "jouer" avec cette jeune femme, qui voyait avec es paroles son monde s'effondrer et prendre une nouvelle dimension autour d'elle ? Je coris que je ressentais l'envie - non, le besoin - de lui ouvrir les yeux, de lui montrer une réalité qu'elle n'avait jusqu'alors pas soupçonnée.

Comme si cela était la garantie de mon existence, c'était un besoin impérieux, et même moi, une déesse, je ne pouvais y résister.

C'était ri-di-cule..Non! LULË était ridicule! On ne peut pas être seule au monde. Il y a toujours quelqu'un ou quelque chose derrière nos actes. Lulë essayait seulement de se faire croire qu'elle décidait de sa vie au jour le jour. Mais son destin était déjà dessiné et il la vouait à louer cette déesse. Ca aurait pu être pire... Elle aurait pu servir une déesse hideuse comme elle l'avait imaginée étant enfant.

OUI! elle se souvenait d'elle! Étant enfant, sa mère lui en avait déjà parlé. Vosyu savez le genre de recommendations d'une mère:" Ne traîne pas avec cette fille!" Mais pour Lulë c'était " Ne vénère pas cette déesse!" On lui avait décrit Daemya ciomme une femme au teint blanc et auxyeux noirs avec uen hcevelure fourmillante d'insectes et à l'haleine fétide. Tout le contraire de celle qui était en face d'elle.

Un sourire se dessina sur les lèvres de Lulë puis elle retourna s'asseoir à côté de sa déesse. Elle allait surement s'y faire. C'était très rare que l'ange déchue se laissait amadouer si facilement. Mais Daemya n'était pas une déesse pour rien. C'était sa fonction de charmer les gens pour qu'il l'honore.

-En tout cas... Vous n'êtes pas comme je vous imaginait.

Un rire coquin sortit d'entre ses lèvres puis elle continua.

-Vous devez avoir des serviteurs beaucoup plus assidus dans leur tâche que moi j'imagine?

Tiens, on dirais que la jeune déchue s'est calmée... Elle devait commencer à assimiler ce que je voulais lui dire... Elle revint s'assoir près de moi. Un joli sourire vient orner son visage.

"En tout cas... Vous n'êtes pas comme je vous imaginait."

Tiens donc...

"Vous me préférez comme ceci ?"

Je pris alors le plus horrible des aspects sous lequel on m'avait représentait en ce bas monde : une femme à la peau blanche ternie, toute vêtue de noire, sans le moindre visage, juste un espace vierge là ou aurait dû se trouver un nez, un bouche, des yeux... Mes longs cheveux noirs s'étaient eux aussi métamorphosés, laissant planer un doute épouvantable sur leur véritable nature : chevelure ou masse grouillante d'insectes ? J'étais à présent vraiment hideuse, et je laissais passer une seconde avant de reprendre mon apparence précédente, plus... normale.

"Vous savez, la plupart de mes servants sont des fainéants. Enfin, de mon point de vue. Tous des planqués. Ça veut prendre le pouvoir, mais ça a peur de se salir les mains. Alors forcément, y a des moments où je me sens un peu seule... Blasée, comme certains humains aiment à le dire..."

Lulë avait reculé sa tête et essayé de cacher une grimacre de dégoût lorsque la déesse avait pri une apparence hideuse. La vue de sa chevelure grouillant de bestioles lui levait le coeur. En effet, Lulë jugeait très bien par les apparences. C'était comme si le monde du meurtre et de la trahison ne l'intéressait plus du tout à la vue de sa déesse.

C'était donc la raison de son charme! qui donc voudrait vénérer une femme immorale avec une apparence aussi repoussante? On préférait vénérer une femme immorale mais avec une apparence tout à fait charmante. Le physique était donc très important chez les divinités. Ca devait être pour sa beauté que certains lui vouaient un culte qui n'était surement pas réciproque.

Mais elle s,ennuyait. Enfin, c'était ce qu'elle disait à Lulë. Pauvre petite déesse qui se sentait seule. Et elle qui pensait que la vie divine était superbement remplie d'aventures. Elle commençait à croire qu'être mortelle avait ses avantages.

-Alors, vous rêvez d'aventure ?

Elle lui fit un clin d'oeil

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